Signatures

 

 

 

Signatures

 

 

 

 

Comme nous l'avons signalé dans le chapitre introductif, le premier à avoir publié sur l'apparition et l'histoire des signatures, des registres et des réclames est Gervais-François Magné de Marolles (1727 - vers 1792) dans L'Esprit des journaux de mai 1782 (consultable sur Google Books). S'appuyant sur ses observations personnelles de plus de deux cents ouvrages, il y publiait des Recherches sur l’origine et le premier usage des registres, des signatures, des réclames et des chiffres de pages dans les livres imprimés.

 

 

Ce texte fut réédité en 1783, à Paris chez Barrois l'aîné, en un petit volume octavo de 51 pages, aujourd'hui consultable sur Gallica et sur Google Books. Il a été réédité, accompagné d'une traduction italienne, d'une introduction et de commentaires de Maria Gioia Tavoni par les éditions Arnaldo Forni de Bologne en 2008.

 

               

 

 

Dans son ouvrage, Magné de Marolles attribuait l'invention des signatures à Jean de Cologne, imprimeur de Venise, en 1474.

Cette thèse a été contestée par Charles-Antoine de La Serna Santander (1752- 1813) dans son Mémoire sur l'origine et le premier usage des signatures et des chiffres dans l'art typographique... Bruxelles, des presses d'Armand Gaborria, an IV [1795-1796] (consultable sur Google Books).

 

 

La Serna y attribuait la première utilisation des signatures à l'imprimeur de Cologne Jean Koelhoff dans son ouvrage Praeceptorium divinae legis de Jean Nider publié en 1472. De fait, ainsi qu'on pourra le constater sur la photo ci-dessous, cet ouvrage comporte bien des signatures !

 

 

 

 

Une signature, selon la définition de McKerrow, consiste en une lettre majuscule suivie, sauf pour le premier feuillet, d’un chiffre romain ou arabe, et correspondant à un cahier.
Les lettres vont de A à Z, en omettant J, U et W. Les pièces liminaires, toujours imprimées en dernier lieu avec le titre et le faux-titre, et toujours après l'impression du texte principal, peuvent être signées de minuscules, ou de signes symboliques.
S’il y a besoin d’un alphabet supplémentaire, on recommence à Aa, Aaa…
Seuls les premiers feuillets du cahier, en général la première moitié,  portent la signature.

Comme les réclames, les signatures constituent un système de repérage destiné à faciliter le travail du relieur, en particulier le pliage de la feuille puis l'agencement des cahiers, à une époque où la foliotation et la pagination des feuillets imprimés étaient complexes et souvent fautives.

 

Les constatations et informations qui suivent sont tirées de l'article de R. A. SAYCE, "Compositorial Pratices and the Localization of Printed Books 1530-1800", The Library, 5th Series, vol. XXI, n° 1, March 1966, p. 1-45. Cet article a été réédité en 1979 par l'Oxford Bibliographical Society.

 

 

 

 

SIGNATURES DES PIÈCES LIMINAIRES

 

L’astérique *
 
La plus commune des signatures, partout et à toutes époques.
A ne pas confondre avec l’indication d’un carton (au XVIIIe siècle).
Généralement caractéristique de la Hollande (Leyde 1573-Amsterdam 1582- 1799).
Ces signatures hollandaises peuvent aller de 1 astérisque à 12, ce qui ne se fait pas ailleurs.
 

Hors de la Hollande actuelle, l’astérisque est attestée à Anvers (1534-1668, Plantin-Moretus 1571-1668), et dans d’autres villes de la Belgique actuelle.
 En France, elle est assez rare, le plus souvent combinée avec d’autres symboles : † ( [
Elle apparaît seule, de temps en temps, au XVIe siècle et dans la première moitié du XVIIe siècle (1532-1655).
 
Elle réapparait au XVIIIe siècle (1735-1774).
Elle est très commune dans les fausses adresses de Paris, tout spécialement à la fin du XVIIe siècle.
A Lyon, elle est assez fréquente de 1553 à 1653.
On la trouve à Saumur (1662-1670), Caen (1562), Bordeaux (1582), Rouen (1602-1616), Orléans (1643), Arles (1680), Saint-Omer (1723).
En Suisse, on la trouve à Neuchâtel dans la Bible d’Olivetan (1535), et à nouveau en 1744 et 1783.
Elle est assez fréquente à Genève (1540-1672), puis en 1738 et 1753.
Elle est très rare à Bâle (un cas en 1587) et à Zürich (un cas en 1562).
En Italie, elle est très exceptionnelle, et ne se rencontre qu’au XVIe siècle ou à la fin du XVIIIe siècle : Rome (1551-1593, 1648, 1696, 1772-1783), Venise (1534-1588, 1698, 1708-1773), Padoue (1587-1722), Florence (1552-1594, 1684), Ferrare (1586).
Tous les autres cas appartiennent au XVIIIe siècle : Palerme (1723), Vérone (1735-1737), Lucques (1749), Naples (1765, 1790), Turin (1772)…
Quelques cas en Espagne et au Portugal : Coimbra (1564), Madrid (1638), Saragosse (1649), Séville (1687), Lisbonne (1720), Salamanque (1737), Barcelone (1796).
En Allemagne, le cas le plus ancien est attesté à Francfort en 1543. On rencontre quelques cas isolés à la fin du XVIe siècle, et au début du XVIIe siècle : Oberursel (1558), Dillingen (1575), Tübingen (1577), Francfort (1581-1627), Cologne (1589-1619)…
A la fin du XVIIe siècle et au XVIIIe, on retrouve l’astérisque à Dantzig (1651), Duisburg (1658), Francfort (1681-1746), Cologne (1683), Leipzig (1691-1791), Dresde (1679, 1737), Berlin (1749), Vienne (1791)…
Strasbourg est un cas un peu particulier, puisque cette forme de signature est attestée sur des impressions qui vont de 1595 à 1710.
En Angleterre, elle est rare : neuf exemples londoniens de 1566 à 1590. Cinq autres cas sont connus en 1672, 1687, 1710, 1733, 1760. Quatre cas sont attestés à Oxford (1585, 1612, 1637, 1659), et un à Cambridge (1582).

 
 
L’obelus
 
Symbole beaucoup moins courant que l’astérisque.
Assez largement répandu. Particulièrement caractéristique de l’Italie de la fin XVIe siècle et XVIIe siècle, et à un moindre degré et plus tardivement de la Hollande.
Le plus ancien cas italien est attesté à Bologne en 1551. Plus tard, on trouve ce symble à Venise (1574-1617), Rome (1624-1704), et dans de nombreuses villes italiennes.
En Hollande, les premiers exemples datent du début du XVIIe siècle : Leyde (1609-1624). Ce symbole est surtout utilisé à partir de la moitié du XVIIe siècle : Amsterdam (1649-1742), Breda (1653), Gouda (1655), Rotterdam (1699), Leyde (1719, 1779)… Il est alors souvent associé à l’astérisque.
En dehors d’Italie et de Hollande, les cas sont plus rares.
 Dans le livre parisien, ce symbole est le plus souvent combiné à d’autres.
Il apparait occasionnellement seul au XVIe siècle (1566-1577), deux cas sont connus pour le XVIIe siècle (1602, 1658), aucun n’est attesté ensuite.
 
A Lyon, on trouve quelques cas d’usage du symbole seul, sans association à un autre (1599-1659).
 
 
 
 
       
 
 
    
 
 
Une étrangeté lyonnaise parmi les combinaisons de symboles est la suivante : †, *, **, *†*, **†*
Les autres villes françaises à utiliser l’obelus sont Bordeaux (1574) et Troyes (1641).
Deux cas d’utilisation de l’obelus attestés à Anvers (1561, 1574, ce dernier chez Plantin).
En Suisse : deux cas à Bâle (1566, 1601), quatre à Genève (1626-1718), un à Lausanne (1748).
Les exemples allemands sont rares et concentrés dans les dernières années du XVIe siècle et les premières du XVIIe : Cologne (1591-1613), Francfort (1607-1637), Mayence (1609).
En Angleterre : un cas connu à Oxford (1668) et trois en combinaison à Londres (1571, 1722, 1733, ce dernier avec le symbole à l’envers). On connait aussi un cas londonien d’utilisation d’une croix de Lorraine ‡.
L’obelus suggère donc  une provenance :
- italienne,
- ou, à partir de la fin du XVIIe siècle, hollandaise,
Sa présence, non accompagnée d’autres symboles sur un livre « français » postérieur à 1660, doit être considérée comme la preuve d’une provenance étrangère.

 

 
Le paragraphe ¶
 
Trois types de symboles : fermé (1), ouvert (2), à deux jambages (3).
On le trouve principalement à la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe, majoritairement à Genève, puis dans une moindre mesure à Francfort. Il reste en vogue en Espagne très longtemps. Il est rare ailleurs.
En France, on connait trois cas parisiens (1597, 1609, 1679), tous du type 1, quatre cas lyonnais (1594-1623) et quelques cas isolés : Tournon (1605), Maillé (1616), Saumur (1674).
En Hollande, seul Leyde utilise ce symbole (1609, 1618, 1620). Il est totalement ignoré à Amsterdam.
Ce symbole suggère une provenance genevoise ou peut-être espagnole.
Il est une contre-indication à une provenance italienne , belge (après 1620), ou hollandaise.
Il n’est en rien caractéristique de l’imprimerie française.

 
 
La section §
 
Très rare.
Une certaine prédilection italienne et espagnole pour ce symbole : Naples (1608), Padoue (1654), Venise (1671), Florence (1724), Valence (1628), Madrid (1638, 1663), Huesca (1646), Séville (1648)…
Contraire à toute provenance hollandaise.
Un cas connu pour Strasbourg (1570), le symbole entre deux points : . § .

 
 
Croix grecque et croix de Malte
 

Différentes variantes de ces symboles.
Premier exemple attesté : Barcelone 1543.
Autres cas anciens connus : Louvain (1550), Bâle (1555, 1566, 1567), Anvers (1592), Lisbonne (1685) en combinaison avec d’autres symboles.

 


 Dénote généralement une provenance italienne (et principalement romaine) : Venise (1555 et 1734), Rome (1606-1672), Florence (1612-1695). Autres cas isolés : Milan (1647), Bologne (1627), Pérouges (1651), Modène (1706), Lucques (1744).

Utilisées seules après 1600, forte présomption de provenance italienne.
 
 
Parenthèses et crochets
 
Parenthèses inversées : )(  ):(  )o(  )?(
Méthode germanique caractéristique de signature des feuillets préliminaires.
Ces séquences peuvent se suivre sur plusieurs cahiers successifs.
Premiers exemples connus : Oberursel (1558), Bâle (1569-1584).
Utilisation très rare en dehors de la zone germanique : Leyde (1659, 1697), Amsterdam (1660), Louvain (1648), Londres (1656 en combinaison avec A)…
 
 
 
 
Dans cette édition in-quarto  de Mayence, de 1604, comportant une réclame de page à page, les pièces liminaires sont signées de parenthèses adossées. Seuls les trois premiers feuillets de chaque cahier sont signés.
Le titre  (ci-dessus) constitue le premier feuillet du cahier ) (
 
 
Recto du second feuillet du premier cahier des pièces liminaires.
 
 
Recto du troisième feuillet du premier cahier des pièces liminaires.
 
 
Recto, non signé, du quatrième feuillet du premier cahier des pièces liminaires.
 
 
Recto du premier feuillet du second cahier des pièces liminaires.
 
 
Recto du premier feuillet du troisième cahier des pièces liminaires.

 
Recto du premier feuillet du quatrième cahier des pièces liminaires.
 
 
Recto du second et dernier feuillet du quatrième cahier des pièces liminaires.
 
Nous signalons, ci-dessous, une exception lyonnaise sur un in-octavo de 1604, signé jusqu'au cinquième feuillet :
 
     
 
 
     
 
 
       
 
 
   
 
 
 
 
Parenthèses entourant d’autres symboles :
(:) pratique uniquement germanique : Bâle (1578), Francfort (1579-1638), Cologne (1616, 1620)… Non attestée ailleurs.
(*) pratique hollandaise et allemande : Leyde (1636), Amsterdam (1648), Rotterdam (1650, 1655, 1657), Dordrecht (1657), Francfort (1581), Hanau (1604), Cologne (1609), Hambourg (1670), Dresde (1679), Strasbourg (1710). Un cas connu à Londres (1635), Madrid (1638), et Stockholm (1652).
(†) un cas connu à Amsterdam (1655) et un autre à Stockholm (1713).

 

(a) (b) (c) : les lettres de bas de casse sont attestées aux Pays-Bas : La Haie (1681), Amsterdam (1684, 1700, 1734), Utrecht ( 1696). Un cas connu à Augsbourg (1723) et deux à Genève (1626, 1716). Pratique commune en Angleterre depuis le milieu du XVIIe siècle.
(a (b (c : forme qui apparait à Londres en 1642
[a] [b] [c] : également caractéristique de Londres est l’inclusion de lettres bas de casse entre crochets carrés : Londres (1682-1762). Deux seuls cas connus hors d’Angleterre : Rotterdam (1697, 1720).

 

Minuscules

Comme l’astérisque, les minuscules a, b, c, d… sont les signatures les plus fréquentes pour les pièces liminaires. On les trouve partout. Elles deviennent encore plus répandues au XVIIIe siècle, que ce soit en caractères romains ou italiques.
Premiers exemples attestés : Anvers (1530), Bâle et Zürich (1538), Paris (1548), Lyon (1558), Venise (1561)…
La pratique est cependant assez rare en Hollande et en Allemagne au XVIIe siècle.
En Suisse, exception faite des cas du XVIe siècle, cette pratique n’est attestée qu’à la fin du XVIIIe siècle (Lausanne 1763…)
Les lettres doubles aa bb cc sont une pratique du XVIe siècle à Paris (1519, 1560), Lyon (1532, 153---) et Venise (1588).
En résumé :
très large utilisation au XVIIIe siècle
au XVIIe siècle, suggère plutôt une pratique italienne ou, dans le cas de la Hollande, une provenance d’Amsterdam.
Assurance d’une provenance non helvétique (sauf à partir des années 1760). 

 

Capitales A B C…

Cas rare dans la mesure où il n’y a pas distinction entre les pièces liminaires et le texte principal.
Mais des cas rares sont connus pour le XVIe siècle aussi bien en France (Paris, Lyon, Bordeaux…) qu’en Italie, Suisse, Allemagne ou en Espagne.
La pratique est extrêmement rare, mais attestée, en Hollande.
Comme pour les minuscules, on peut rencontrer, au XVIe siècle, des lettres redoublées : AA BB CC (Venise 1516, Paris 1520-1521, Bâle 1550, Zürich 1592).

 

Pratique anglaise

La pratique anglaise traditionnelle consiste à commencer à signer le texte principal avec la lettre B, et de réserver la lettre A aux feuillets liminaires. Quand ces derniers ne forment qu’un seul cahier, il n’y a pas de problème.
Si les pièces liminaires font plus d’un cahier, on double la capitale A d’une minuscule (a, b, c…) ou d’un symbole * (*), ¶… tant que de besoin : A*, A(*), A¶, Aa, Ab, A(a), A(b)…

 

 

 

 Verso de la page de titre, recto du premier cahier (début du texte principal) signé B


Autre exemple de signature B du premier cahier au tome 2 de cette  édition londonienne de 1784 :

 

   

 

 

 

Voyelles tildées ā ē ī ō ū

Une des caractéristiques du livre parisien, et du livre français provincial suivant le modèle parisien tout au long de la période du livre artisanal.
Si une seconde série est nécessaire, on double les voyelles : āā ēē īī ōō ūū.

 


Rouen suit cette pratique tout au long du XVIIe siècle (1601-1675). A Lyon, les choses sont plus complexes : premier cas en 1582, cas isolés jusqu’en 1650, pratique générale ensuite jusqu’en 1768.
En résumé, l’utilisation des voyelles tildées caractérise une production française, et essentiellement parisienne avant 1760.
On peut trouver occasionnellement ce type de signature des pages liminaires dans des livres allemands des années 1575-1640, et dans des livres hollandais de la fin du XVIIe siècle ou du début du XVIIIe.

 

Caractères grecs αβγ

Pratique de l’Humanisme du XVIe siècle.
Caractérise tout spécialement Bâle, où ces caractères sont fréquemment utilisés entre 1533 et 1572.
Apparaissent aussi à Zürich (1556, 1559), Strasbourg (1539, 1566), Leipzig (1562), Venise (1563), Paris (1570, Francfort (1589), Leyde (1600).
Suggèrent plutôt une impression bâloise ou suisse allemande.

A titre d'exception, nous donnons, ci-dessous, l'exemple d'un in-folio lyonnais de 1554 :

 

          

 

 

            

 

 

 

Autres symboles rares

 

 

 

SIGNATURES DU TEXTE PRINCIPAL

 

Bas de casse

Pratique assez courante et très largement répandue au XVIe siècle et début XVIIe.
A Genève, on signe encore en minuscules pendant une bonne partie du XVIIe siècle, jusque vers 1665.
En cas de besoin d’un second alphabet, on continuait avec des majuscules.
A Anvers, et tout spécialement chez Plantin, on inverse le processus en commençant par une capitale A, en poursuivant par une minuscule a, et éventuellement par Aa.
La pratique des signatures en bas de casse réapparait en Italie au XVIIIe siècle.
McKerrow remarque que dans le livre français du XVIe siècle, on utilise parfois les deux lettres lz en guise de k (Paris 1542, Genève 1551).

 

A sur un feuillet blanc

La première signature A sur un feuillet blanc précédent la page des titre, ou exceptionnellement sur le faux-titre, est une pratique exclusivement anglaise.
Elle est surtout attestée au XVIIe siècle.

 

B comme première signature du texte principal

Pratique anglaise (c.f. supra).
Premier exemple attesté à Londres en 1569, puis dans huit cas entre 1571 et 1599, et à Cambridge en 1591.
Pratique qui se généralise au XVIIe siècle, et est très commune au XVIIIe siècle, jusqu’en 1796.
Cette pratique est commune à Dublin au XVIIIe siècle.
En revanche, on ne connait qu’une édition d’Edimbourg (1711) qui la suit.
Quelques cas sporadiques sont attestés ailleurs : pour la France, Paris (1569 et 1791), Rouen (1603), Tournon (1604, 1605, 1616), Lyon (1649), Saint-Malo (1650).

 

U et V

U est normalement omis. Alde Manuce l'utilise pourtant, en minuscule (mais la majeure partie de l'ouvrage est signée en minuscules) dans son Hypnerotomachia Poliphili imprimé en 1499, dont sont tirées les deux photos suivantes.

 

      


L'utilisation du U à la place de V est confinée aux Iles britanniques (première occurrence Londres 1658) et à l’Allemagne ( première occurrence Augsbourg 1667) de la fin du XVIIe siècle et du XVIIIe.
L’utilisation du U en dehors de ces zones géographiques est très rare : un cas à Stockholm (1697) et Copenhague (1746), un à La Haye (1682), un à Lisbonne (1685), et un à Paris (1784).

 

W
Utilisation connue dans une seule édition londonienne de 1785 : AMES, Typographical Antiquities, London, T. Payne et al., 1785 (Bodléienne 258.d.7-9).

Deux autres éditions du XVIe siècle présentant cette particularité sont signalées dans : W.A. JACKSON, The Carl H. Pforzheimer Library, New-York, 1940, n° 73 et 467.

 

Second alphabet et alphabets suivants

Le second alphabet prend normalement la forme Aa.
Mais on peut trouver d’autres combinaisons : AA peut suivre directement A ou Aa.
AA est une pratique de la fin du XVIe siècle et du début du XVIIe assez largement répandue : Paris (1518-1631), Lyon (1558-1604), Anvers (1584-1634)…
La forme AA est caractéristique du XVIIIe siècle : Florence (1723), Glasgow (1763).
La forme AAa ou AAaa est française : Paris (1552-1719), Lyon (1558-1689), Troyes (1641), Saint-Malo (1650), Genève (1617, 1644). On ne connaît que deux exemples extérieurs à cette sphère : Cologne (1603) et Rotterdam (1720).
La forme 3A ou 4A… comme abréviation de la séquence est uniquement britannique et caractéristique du XVIIIe siècle.

 

 Sf et Ss ; Vu et Vv 

Différentes combinaisons de ces formes sont possibles, et il est difficile d’en tirer des conclusions.
On constate une préférence parisienne, de 1552 à 1774, pour les formes Sf et Vu.
A Anvers, à la fin de la période Plantin, il y a une préférence pour la forme Sf, tandis que Vu et Vv sont utilisés indistinctement.
En Hollande, les deux formes de S sont utilisées indistinctement.
En Angleterre et en Ecosse, Sf est la forme la plus fréquente entre 1574 et 1798. A la fin du XVIIe et au XVIIIe siècle, la forme Uu est la plus usitée.
En Allemagne et en Italie, Sf et Vu prédominent jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, Ss et Vv ensuite.


 

Chiffres arabes à la place des lettres

Pratique de signature la plus commune au XIXe siècle et après.
On connait quelques rares cas de la fin du XVIIIe siècle : Paris (1766 et 1788) et Parme (1795).

 

Chiffres romains ou chiffres arabes

En général, les chiffres romains sont très utilisés, un peu partout, jusqu’à la fin du XVIe siècle. Ensuite, ils sont une caractéristique française, et spécialement parisienne.
Les pratiques de la province française sont plus complexes.
Rouen, le nord et l’est (Nancy) suivent la forme parisienne.
Lyon a une pratique du chiffre arabe de 1532 à la fin du XVIIe siècle. A partir de 1680, Lyon adopte la pratique parisienne du chiffre romain (1680-1780), avec une hésitation et un mélange des deux usages en 1694.
Les villes qui suivent l’usage de Lyon sont principalement celles du sud : Tournon, Orléans, Narbonne, Avignon. On doit leur ajouter le cas un peu exceptionnel de Douai.

Les deux pratiques sont utilisées, dans des chronologies variables) à Saint-Omer, Evreux, Bordeaux, Toulouse (chiffres arabes 1612-1660 puis 1784-1786 ; chiffres romains 1712-1784).
En Belgique, les chiffres arabes prédominent après le milieu du XVIe siècle : Anvers, Bruxelles, Louvain, Liège, Gand, Luxembourg, Bouillon.
En Suisse, différence marquée entre Genève et Bâle. A Genève les deux formes se retrouvent tout au long de la période : chiffres romains 1546-1780, arabes 1540-1780, mais les chiffres romains sont majoritaires (influence française ? Lyonnaise ?). A Bâle, il y a une prédominance des signatures en chiffres arabes. Zürich suit l’exemple bâlois avec l’usage exclusif de chiffres arabes (1556-1670).

En Italie, les chiffres arabes sont fermement établis dans la seconde moitié du XVIe siècle et prédominent jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Les chiffres romains ne sont courants qu’à Venise entre 1550 et 1580.
En Allemagne, les chiffres arabes apparaissent tôt : Mayence (1530), Tübingen (1533) et prédominent jusqu’à la fin de la période. Pourtant, les chiffres romains perdurent plus longtemps qu’en Italie. On en trouve à Francfort jusqu’en 1637 et à Leipzig jusqu’en 1691. On en connaît quelques rares exemples au XVIIIe siècle.
Strasbourg utilise les chiffres arabes de 1539 à 1775. On ne connaît que trois exemples d’utilisation de chiffres romains (1540, 1565, et 1570).

La pratique hollandaise suit la pratique allemande. L’utilisation des chiffres romains est rare, et souvent le fait d’imprimeurs d’origine française.
Dans les Iles britanniques, les chiffres arabes sont utilisés, presque sans exception, depuis 1600. Les chiffres romains étaient plus communs au XVIe siècle.
Dans la péninsule ibérique, l’utilisation des chiffres arabes est presque exclusive (Alcala 1580-Barcelone 1796). On ne connaît que trois exceptions : Barcelone 1543, Saragosse 1555, Coimbra 1564.

 

ii et ij

Les premiers livres signés en chiffres romains utilisent ii, iii…
Durant le XVIe siècle, on remplace cet usage par celui de ij, iij… C’est le cas à Paris dès 1530.
Les ouvrages qui sont signés ii après 1580 sont pour l’essentiel d’origine genevoise.

 

iiij et iv

A Paris, le chiffre quatre est constamment imprimé iiij jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, où il est remplacé par iv : première occurrence 1750, dernière utilisation de iiij 1761.
Après 1760, d’autres villes suivent : Lyon (1768), Genève et Avignon (1769), Dresde (1771), Amsterdam (1775), Neuchâtel (1777), Maastricht (1779), Hambourg (1798).
On trouve aussi quelques curiosités : jv (Lausanne 1770), iiiij (Leipzig 1655), iiiiij (Paris 1583).

 

Premier feuillet signé Aj

La numérotation du premier feuillet du cahier Ai ou Aj est limitée au XVIe siècle, et à quelques cas du XVIIe siècle.
On la trouve à Paris de 1520 à 1610, à Bordeaux en 1576, à Lyon en 1594.
Il y a des exemples fréquents en Grande-Bretagne.
Cette pratique est très fréquente à Genève, où elle apparait en 1553, jusqu’au XVIIe siècle. Sa dernière utilisation est de 1642.
Un dernier cas est signalé à Leipzig en 1642.

 

Utilisation des points : A.ij.

Dans certains ouvrages du XVIe siècle ou du premier XVIIe siècle, on peut trouver un ou deux points utilisés dans la signature.
On ne connait aucune raison précise à cette pratique.

 

Position de la signature sur la ligne

L’utilisation de réclames de page à page a eu pour conséquence de repousser la signature en milieu de ligne.
Sayce s’est peu penché sur cette question, et n’a pas repéré les pratiques géographiques mises en évidence depuis.

 

Nombre de feuillets signés

Une des indications les plus utiles pour la détermination d’une origine.
Paris : signatures jusqu’en milieu de cahier, sauf pour les quartos jusqu’en 1770 qui sont signés 1-3. Une variante peut intervenir pour les in-douze à feuilleton dehors : le premier cahier est toujours signé 1-4, le second 1-3 jusque vers 1680, puis 1-2 ensuite. Les exceptions à ces règles sont très rares.

Lyon suit la pratique parisienne pour les quartos (1-3 1552-1703) et les in-12 (1-6 1605-1780), mais une spécificité apparait pour les octavos, signés 1-5 durant la grande période de l’imprimerie lyonnaise (1532-1653). Occasionnellement avant 1653 et régulièrement après, on rencontre des signatures 1-4 (1574-1771).
On connait deux in-12 signés 1-7 (1595 et 1599), et plusieurs signés 1-5 entre 1672 et 1694.

A Rouen : on suit la pratique parisienne pour les octavos. Les in-12 sont souvent signés 1-5 entre 1597 et 1616. Ensuite, il sont signés 1-6.
Les autres villes suivent généralement l’usage parisien, sauf Tournon (octavos signés 1-5 1604-1616 ; un in-12 signé 1-5 1595), Bordeaux (1580, 1582) et Trévoux (1702) qui ont des octavos signés 1-5.
La Belgique et la Suisse présentent des cas complexes. Anvers suit généralement les usages hollandais (quartos signés 1-3, octavos 1-5, in-12 1-7).

En Suisse, on retrouve la partition entre pratiques allemandes (Bâle, Zürich) et pratiques françaises. A Genève, les quartos sont signés 1-3, les octavos 1-4 (1551-1782), bien qu’on trouve aussi beaucoup de signatures 1-5 entre 1540-1630, les in-12 1-6.
En Allemagne, les quartos sont signés 1-3, les octavos 1-5, les in-12 1-6 ou 1-7.
En Italie et en Espagne, seule la première moitié du cahier est signée : octavos 1-2, quartos 1-4, in-12 1-6.

L’Angleterre suit généralement l’usage hollandais. Les quartos sont d’abord signés 1-3, puis 1-2 à partir de la mi-XVIIe siècle (Londres 1656, Oxford 1677, Cambridge 1691). Les octavos sont signés 1-4, même si la signature 1-5 est commune à Londres au XVIe siècle (1534-1607). Les in-12 sont parfois signés 1-6, mais plus souvent 1-5, y compris au XVIIe siècle.

 

 

Les pratiques de signature sont un critère important pour le dévoilement de fausses adresses.

 

 

       

 

 

Dans l'exemple ci-dessus (un in-douze), l'emplacement de la signature en milieu de page, le fait de signer le premier feuillet de la seconde moitié du cahier (le septième feuillet), l'utilisation de chiffres arabes sont caractéristiques des pratiques hollandaises. L'adresse d'Amsterdam (Marc-Michel Rey) de cette édition du baron d'Holbach est authentique.

 

 

 

 

Dans ce second exemple, lui aussi in-douze mais par demi-cahiers, l'utilisation de signatures situées à droite, aux deux tiers ou aux trois quarts de la page, trahit une production française. Le soupçon est renforcé par la pratique de la réclame de cahier à cahier et le recours aux demi-cahiers de six feuillets. Cet ouvrage est manifestement une impression française sous fausse adresse d'Amsterdam.

 

 

Signatures aberrantes :

Au cours de ses investigations, le bibliographe peut parfois tomber sur des signatures aberrantes difficilement explicables. Nous en donnons ci-dessous quelques exemples. Le premier est l'ouvrage de Denis Fournier, publié chez Sébastien Cramoisy vers 1678, sous le titre L'Anatomie pacifique nouvelle et curieuse.

 

 

 


 

 

 

Le second est L'Alphabet chirugical, du même Denis Fournier, publié en 1672.

 

 

 

 

 

 

 



 

 

 

 

© Dominique Varry 2011-2014 Introduction à la bibliographie matérielle