Le matériel du bibliographe

 

 

 

  

Le matériel du bibliographe  

 

 

 

Le bibliographe est amené à se déplacer, pour aller examiner et collationner des exemplaires dispersés dans de multiples collections de statuts divers. Outre son matériel de prise de notes (du carnet de moleskine au net book ou à la tablette électronique de son choix), et un appareil photo numérique, il n’aura garde d’emporter avec lui quelques petits objets qui se révéleront vite indispensables :

  • une loupe, utile pour examiner certains détails,
  • un double décimètre, ou mieux un mètre ruban, pour mesurer réglets et ornements, mais aussi les lignes de caractères,
  • un miroir de poche, utile pour déchiffrer les décharges d’encre,
  • une petite table lumineuse portative ultra mince, pour traquer les contremarques de filigranes. On en trouve pour des sommes modiques dans le commerce.

 

 

Le bibliographe plus fortuné pourra s’offrir un équipement beaucoup plus performant puisque constitué d’une feuille translucide qu’on peut insérer dans le livre, sous le feuillet à examiner, de manière à faire apparaitre filigrane et contremarques :

 

 

                                                                                             

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Le bibliographe devra parfois avoir recours à une lampe de Wood à rayons ultra-violets pour lire des filigranes, mais surtout des mentions manuscrites biffées. Les bonnes bibliothèques en auront une à proposer au lecteur de passage. Sinon, notre chercheur pourra toujours emporter avec lui, mais sans garantie d’efficacité, une de ces petites lampes UV qu’on trouve dans les magasins de philatélie.

L’éditeur de textes pourra toujours espérer disposer d’une machine à collationner.

La première a été mise au point par Charlton Hinman au milieu du XXe siècle, en s'inspirant de sa pratique, durant la seconde guerre mondiale, de l'analyse de photographies aériennes. C'est cette machine qui lui a permis, comme le rappelle le site de la Folger Shakespeare Library de Washington, de mener à bien sa magistrale étude, publiée en 1963, Printing and Proof-reading of the First Folio of Shakespeare, de la première édition in-folio de 1623 des oeuvres du dramaturge. Pour une présentation plus complète de la machine et de la méthode, on se reportera à l'article de Steven Escar Smith : « ‘The Eternel Verities Verified’ : Charlton Hinman and the Roots of Mechanical Collation » publié dans Studies in Bibliography, volume 53, 2000.

Plus récemment, Randall McLeod de l’Université de Toronto, a mis au point un instrument transportable dans un attaché-case, et actuellement possédé par certaines grandes universités anglo-saxonnes : le McLeod's Portable Collator.

Sur les photos suivantes, le professeur Neil Harris (Université d'Udine) installe et règle un "Portable Collator" dans la salle de lecture de la Bibliothèque municipale de Lyon, pour une démonstration. Le règlage des deux miroirs doit être très précis. En effet, si les pages des deux exemplaires en cours de comparaison sont identiques, leurs deux images doivent se superposer et être lisibles. Si l'une des deux pages présente une variante, une zone floue doit apparaître sur les miroirs, invitant le bibliographe à aller vérifier sur les deux exemplaires les différences de composition ainsi détectées.

 

 

 

 

 

 

 


 

 

Le lecteur intéressé par ces machines, et d'autres non évoquées dans cette page, se reportera avec profit à un autre article de Steven Escar Smith : « Armadillos of Invention : A Census of Mechanical Collators », publié dans Studies in Bibliography,  volume 55, 2002, p. 133-170.

 

 

 © Dominique Varry 2011 Introduction à la bibliographie matérielle